- Introduction
- Chapitre 1 : l'émergence du système d'information
- Chapitre 2 : structure du système d'information
- Ingénierie sémantique
- Ingénierie des processus
- Ingénierie du contrôle
- Ingénierie stratégique
- Les méthodes
- Le système d'information et l'informatique
- Chapitre 3 : La société informatisée
- Annexes
- Dynamique et enjeux de l'iconomie
- Réindustrialiser la France par l'informatisation
- Lectures utiles
- Enjeux de la sécurité
- Bibliographie
Les systèmes d'information
Cours de Michel Volle, école des Mines, 2012
samedi 15 septembre 2012
Plan du cours
dimanche 2 septembre 2012
Introduction
Ce cours a pour but de procurer aux ingénieurs-élèves une connaissance intuitive et générale, mais exacte, de l'informatisation et des systèmes d'information. Il ne prétend pas épuiser l'ensemble du sujet : c'est un thème de recherche, de réflexion et d'expérience qui peut occuper une vie entière.
Le cours s'appuie sur De l'Informatique, savoir vivre avec l'automate, Economica, 2006, que l'on peut télécharger en cliquant sur www.volle.com/ouvrages/informatique/informatique1,pdf. Cet ouvrage, dont la forme s'est inspirée du De la guerre de Clausewitz jusqu'à imiter son excessive longueur, vise à fournir à de futurs stratèges une compréhension correcte de l'informatisation et de son importance.
La version rédigée du cours, ici présente, en condense l'essentiel et reprend le contenu de quelques articles auxquels elle apporte des compléments et qu'elle enrichit de liens vers des textes plus détaillés.
Le lecteur curieux pourra trouver dans www.volle.com des choses qui ne figurent pas dans le cours mais qui, d'aventure, pourraient lui être utiles. La bibliographie indique enfin une liste d'ouvrages : ceux qui semblent les plus intéressants sont signalés par un commentaire.
Jetez un coup d’œil dans les bureaux d'une grande entreprise : vous y verrez des personnes assises devant un écran-clavier, à moins qu'elles ne soient en réunion. L'écran clavier leur donne accès à un système d'information, sur lequel et dans lequel elles travaillent.
Le cours s'appuie sur De l'Informatique, savoir vivre avec l'automate, Economica, 2006, que l'on peut télécharger en cliquant sur www.volle.com/ouvrages/informatique/informatique1,pdf. Cet ouvrage, dont la forme s'est inspirée du De la guerre de Clausewitz jusqu'à imiter son excessive longueur, vise à fournir à de futurs stratèges une compréhension correcte de l'informatisation et de son importance.
La version rédigée du cours, ici présente, en condense l'essentiel et reprend le contenu de quelques articles auxquels elle apporte des compléments et qu'elle enrichit de liens vers des textes plus détaillés.
Le lecteur curieux pourra trouver dans www.volle.com des choses qui ne figurent pas dans le cours mais qui, d'aventure, pourraient lui être utiles. La bibliographie indique enfin une liste d'ouvrages : ceux qui semblent les plus intéressants sont signalés par un commentaire.
* *
Jetez un coup d’œil dans les bureaux d'une grande entreprise : vous y verrez des personnes assises devant un écran-clavier, à moins qu'elles ne soient en réunion. L'écran clavier leur donne accès à un système d'information, sur lequel et dans lequel elles travaillent.
samedi 1 septembre 2012
Chapitre 1 : L'émergence du système d'information
Avant de considérer le système d'information, il faut avoir élucidé ce qu'est l'information telle du moins qu'on la conçoit lorsque l'on bâtit ou utilise un système d'information :
1.1 - Qu'est-ce que l'information ?
L'informatisation a fait émerger dans l'économie et, plus largement, dans la société un être nouveau né de l'alliage du cerveau humain et de l'automate. Quelle est la nature de cet alliage ?
1.2 - Alliage et émergence
L'informatisation a transformé les institutions et, en particulier, les entreprises. L'entreprise contemporaine résulte d'une évolution qu'il faut connaître pour percevoir ce qui fait son originalité :
1.3 - L'évolution de l'entreprise
1.1 - Qu'est-ce que l'information ?
L'informatisation a fait émerger dans l'économie et, plus largement, dans la société un être nouveau né de l'alliage du cerveau humain et de l'automate. Quelle est la nature de cet alliage ?
1.2 - Alliage et émergence
L'informatisation a transformé les institutions et, en particulier, les entreprises. L'entreprise contemporaine résulte d'une évolution qu'il faut connaître pour percevoir ce qui fait son originalité :
1.3 - L'évolution de l'entreprise
vendredi 31 août 2012
1.1 - Qu'est-ce que l'information ?
L'expression « système d'information » date du début des années 1970 et correspond à une situation historique particulière sur laquelle nous reviendrons. Avant cela il convient d'examiner de près le mot « information ».
Shapiro et Varian [36] considèrent que l'information, c'est l'ensemble des documents : ils suggèrent ainsi une synonymie entre « information » et « documentation ». La « théorie de l'information » de Shannon [35] associe à chaque document la mesure du nombre minimal de bits nécessaire pour le reproduire : l'information serait ainsi une mesure du volume de données non redondantes que le document contient. La « science de l'information » décrit les techniques qui permettent de classer un corpus de documents afin d'y trouver aisément ceux dont on a besoin. Ackoff [1] définit enfin l'information comme « les données qui sont traitées afin d'être utiles, et de répondre à des questions comme "qui", "quoi", "où" et "quand" ».
Ces définitions sont toutes critiquables. Parmi les documents qui comportent un nombre donné de caractères, ceux qui apporteraient selon Shannon le plus d'information seraient ceux dont les caractères ont été tirés au hasard car ils ne comportent aucune redondance. Cependant lorsqu'on est confronté à un document illisible ou incompréhensible le langage courant dit avec raison qu'il « n'apporte aucune information », quelle que soit sa longueur...
Shapiro et Varian [36] considèrent que l'information, c'est l'ensemble des documents : ils suggèrent ainsi une synonymie entre « information » et « documentation ». La « théorie de l'information » de Shannon [35] associe à chaque document la mesure du nombre minimal de bits nécessaire pour le reproduire : l'information serait ainsi une mesure du volume de données non redondantes que le document contient. La « science de l'information » décrit les techniques qui permettent de classer un corpus de documents afin d'y trouver aisément ceux dont on a besoin. Ackoff [1] définit enfin l'information comme « les données qui sont traitées afin d'être utiles, et de répondre à des questions comme "qui", "quoi", "où" et "quand" ».
Ces définitions sont toutes critiquables. Parmi les documents qui comportent un nombre donné de caractères, ceux qui apporteraient selon Shannon le plus d'information seraient ceux dont les caractères ont été tirés au hasard car ils ne comportent aucune redondance. Cependant lorsqu'on est confronté à un document illisible ou incompréhensible le langage courant dit avec raison qu'il « n'apporte aucune information », quelle que soit sa longueur...
jeudi 30 août 2012
1.2 - Alliage et émergence
L'alliage de l'automate et du cerveau est un fait relativement récent. Il est utile d'ouvrir ici une parenthèse pour examiner les effets d'émergence qui résultent de la découverte d'un nouvel alliage.
Les alliages ne sont pas tous féconds mais certains d'entre eux ont des propriétés dont l'émergence, faisant apparaître des possibilités nouvelles, transforme le rapport entre la société humaine et la nature – et transforme la nature elle-même si on la définit comme « ce qui se présente comme outil ou comme obstacle devant les intentions humaines ».
Un alliage fécond n'est pas une « union accidentelle » mais une « union substantielle », (dans le langage de la philosophie) car il fait apparaître dans le monde de la nature un être radicalement nouveau : ainsi l'acier, obtenu par alliage du fer et du carbone, fait émerger un métal plus rigide que le fer car les atomes de carbone s'intercalent entre les atomes de fer et entravent leur glissement.
L'alliage de la société humaine et de la production au début du néolithique a fait émerger l'échange, les villes, la comptabilité, l'écriture, bref la civilisation – et aussi la guerre, car le cheptel et les stocks de semences étaient des proies tentantes pour les razzias.
L'alliage de la machine et de la main humaine (« main d’œuvre »), survenu au XVIIIe siècle en Grande-Bretagne, a fait émerger la société industrielle avec les usines, le salariat, la lutte des classes, l'extension des systèmes éducatif et de santé, l'impérialisme et le colonialisme, enfin les guerres mondiales du XXe siècle.
Les alliages ne sont pas tous féconds mais certains d'entre eux ont des propriétés dont l'émergence, faisant apparaître des possibilités nouvelles, transforme le rapport entre la société humaine et la nature – et transforme la nature elle-même si on la définit comme « ce qui se présente comme outil ou comme obstacle devant les intentions humaines ».
Un alliage fécond n'est pas une « union accidentelle » mais une « union substantielle », (dans le langage de la philosophie) car il fait apparaître dans le monde de la nature un être radicalement nouveau : ainsi l'acier, obtenu par alliage du fer et du carbone, fait émerger un métal plus rigide que le fer car les atomes de carbone s'intercalent entre les atomes de fer et entravent leur glissement.
L'alliage de la société humaine et de la production au début du néolithique a fait émerger l'échange, les villes, la comptabilité, l'écriture, bref la civilisation – et aussi la guerre, car le cheptel et les stocks de semences étaient des proies tentantes pour les razzias.
L'alliage de la machine et de la main humaine (« main d’œuvre »), survenu au XVIIIe siècle en Grande-Bretagne, a fait émerger la société industrielle avec les usines, le salariat, la lutte des classes, l'extension des systèmes éducatif et de santé, l'impérialisme et le colonialisme, enfin les guerres mondiales du XXe siècle.
mercredi 29 août 2012
1.3 - L'évolution de l'entreprise
Quand, dans une société civilisée, une mission jugée nécessaire ou opportune dépasse les capacités d’un individu, une institution est créée pour organiser le travail de plusieurs personnes : administration, armée, systèmes éducatif et de santé etc. Dès qu'une action dépasse la sphère étroitement personnelle (se laver les mains...) elle suppose l'intervention d'une institution : le livre, écrit par un auteur individuel, n'atteint ses lecteurs que s'il passe par un éditeur ou tout au moins par le Web. L’État est l'institution des institutions : sa mission consiste à définir les institutions nécessaires, puis à faire en sorte qu'elles remplissent leur mission.
Pour pouvoir assurer sa mission une institution doit bâtir une organisation : définition des règles et procédures, découpage en entités spécialisées dans un domaine de compétences, etc. : ainsi la mission s'incarne dans le monde réel où elle devient capable de produire des effets eux-mêmes réels. Il arrive cependant souvent que l'organisation tende à s'émanciper de la mission, et la trahisse pour favoriser sa propre logique (croissance, privilèges etc.) : il arrive que l'institution militaire tourne ses armes contre son propre pays pour y prendre le pouvoir. L'institution est ainsi le théâtre d'une dialectique entre la mission et l'organisation.
On nomme entreprise l'institution dont la mission est de produire des biens et services marchands qui seront donc achetés ou loués par des consommateurs pour satisfaire leurs besoins.
Toute entreprise est un être vivant : elle naît, croît, évolue, enfin elle meurt ; elle conjugue divers aspects (juridique, économique, technique, sociologique etc.). On ne saurait donc réduire cette complexité organique à une « essence », à une définition.
Pour pouvoir assurer sa mission une institution doit bâtir une organisation : définition des règles et procédures, découpage en entités spécialisées dans un domaine de compétences, etc. : ainsi la mission s'incarne dans le monde réel où elle devient capable de produire des effets eux-mêmes réels. Il arrive cependant souvent que l'organisation tende à s'émanciper de la mission, et la trahisse pour favoriser sa propre logique (croissance, privilèges etc.) : il arrive que l'institution militaire tourne ses armes contre son propre pays pour y prendre le pouvoir. L'institution est ainsi le théâtre d'une dialectique entre la mission et l'organisation.
On nomme entreprise l'institution dont la mission est de produire des biens et services marchands qui seront donc achetés ou loués par des consommateurs pour satisfaire leurs besoins.
Le concept fondamental : l'activité |
lundi 27 août 2012
Chapitre 2 : Structure du système d'information
L’expression « système d’information » (SI) n’est apparue qu’à la fin des années 1960 lorsque les entreprises se sont appuyées sur l’automate programmable que l’on nomme « ordinateur » pour stocker, traiter et utiliser des données.
L'alliage entre l’automate et l’organisation de l’action humaine doit obéir aux exigences pratiques de la rationalité, auxquelles la plate-forme informatique ajoute ses propres exigences, de nature physique.
L’ingénierie du SI demande donc des méthodes et démarches plus explicites que celles dont les entreprises avaient pu se contenter avant l’informatisation. Pour répondre aux exigences de l’action, elle s’appuie sur quatre techniques toutes également nécessaires et qui s’empilent en quatre couches au dessus de la plate-forme informatique : langage, action, contrôle, stratégie.
L’ingénierie sémantique définit le langage de l’entreprise avec l’administration des données et les référentiels ; l’ingénierie des processus structure l’action productive avec la pensée procédurale et la modélisation ; l’ingénierie du contrôle éclaire le pilotage avec les indicateurs et tableaux de bord ; l’ingénierie d’affaires concrétise l’orientation stratégique et le positionnement de l’entreprise.
L’ingénierie du SI ne se confond donc pas avec l’ingénierie de l’informatique qui, avec l’architecture des logiciels et le dimensionnement des ressources, fournit sa plate-forme à l’informatisation de l’entreprise : l’informatique et l’informatisation sont dans un rapport analogue à celui qui existe entre la construction navale et la navigation.
L’alliage de l’automate et du cerveau, devenu ubiquitaire grâce au réseau, a transformé notre rapport à l’espace et au temps ainsi que notre façon de penser et d’agir : il a ainsi fait émerger autant de dangers nouveaux que de possibilités nouvelles. Mais l’informatisation a été trop rapide pour qu’aient pu mûrir les savoir-faire et savoir-vivre qu’elle réclame aux informaticiens, dirigeants et utilisateurs : c’est ce qui explique que les projets informatiques connaissent encore, comme le montrent les enquêtes du Standish Group, un taux d’échec qui ne serait toléré dans aucun autre domaine de l’ingénierie : seuls 25 % des projets aboutissent dans les délais et pour un coût conforme au budget, 25 % n'aboutissent pas du tout, et 50 % aboutissent, mais avec un dépassement important (multiplication par trois) du délai et du coût.
L'alliage entre l’automate et l’organisation de l’action humaine doit obéir aux exigences pratiques de la rationalité, auxquelles la plate-forme informatique ajoute ses propres exigences, de nature physique.
L’ingénierie du SI demande donc des méthodes et démarches plus explicites que celles dont les entreprises avaient pu se contenter avant l’informatisation. Pour répondre aux exigences de l’action, elle s’appuie sur quatre techniques toutes également nécessaires et qui s’empilent en quatre couches au dessus de la plate-forme informatique : langage, action, contrôle, stratégie.
Les quatre couches du SI forment un cercle |
L’alliage de l’automate et du cerveau, devenu ubiquitaire grâce au réseau, a transformé notre rapport à l’espace et au temps ainsi que notre façon de penser et d’agir : il a ainsi fait émerger autant de dangers nouveaux que de possibilités nouvelles. Mais l’informatisation a été trop rapide pour qu’aient pu mûrir les savoir-faire et savoir-vivre qu’elle réclame aux informaticiens, dirigeants et utilisateurs : c’est ce qui explique que les projets informatiques connaissent encore, comme le montrent les enquêtes du Standish Group, un taux d’échec qui ne serait toléré dans aucun autre domaine de l’ingénierie : seuls 25 % des projets aboutissent dans les délais et pour un coût conforme au budget, 25 % n'aboutissent pas du tout, et 50 % aboutissent, mais avec un dépassement important (multiplication par trois) du délai et du coût.
Inscription à :
Articles (Atom)